Le 15 avril 1874, la "société
anonyme des artistes peintres", qui comprenait les artistes
habitués aux expositions officielles, organisa, Boulevard
des Capucines, une exposition parrainée par le photographe
Tournachon, plus connu sous le pseudonyme de Nadar, ami et mécène
des jeunes talents. Ceux-ci avaient pour noms : Cézanne,
Degas, Guillaumin, Monet, Pissaro, Renoir, Sisley, de Nittis,
Bazille, Boudin ou encore Morissot.
(illustrations : "Dans le blé" de
Nittis, " "cathédrales" ; "gares Saint -Lazare" ;Monet)
Edouard Manet est considéré comme l'inspirateur
et l'animateur du groupe. Il s'abstint d'exposer afin de ne pas
heurter les peintres du "Salon officiel".
(Illustration : "Les canotiers d'Argenteuil",
Manet)
La nouvelle exposition suscita des critiques, des protestations et des scandales à n'en plus finir. Alors que Zola la défendait courageusement, la critique du "Charivari", Louis Leroy attaqua, quant à lui, la "motivation artistique" des peintres : "Ils sont sans idées et sans sujets". C'est lui qui les qualifiera d'"impressionnistes", néologisme né du nom d'un tableau de Claude Monet : "Impression, soleil levant".
Mais, dès 1860, les peintres avaient proposé
quelque chose de nouveau. Pissaro, Cézanne et Guillaumin
étudiaient ensemble à l'Académie suisse de
Paris, quant à Monet, Renoir, Bazille et Sisley, ils se
rencontrèrent à l'atelier Gleyze. Ceux-ci s'établirent
d'abord au milieu des bois de Fontainebleau, en contact direct
avec la nature, puis, sur les plages de la Seine et de la Marne
où l'eau et sa couleur, la lumière et les reflets
changent en permanence.
(Illustrations : "L'inondation" Sisley,
1872, "Le déjeuner sur l'herbe" Monet, 1865/1866)
Les premiers essais et les plus complets sont d'Edouard
Manet. Au "Salon des refusés" de 1863, son "Déjeuner
sur l'herbe" déchaîna la colère des critiques.
(Illustration : "Déjeuner sur l'herbe",
Manet)
L'impressionnisme ne se fondait pas sur les théories
pragmatiques ou les formules académiques. Il refusait l'imposition
du sujet (littéraire ou historique), cherchant le "motif"
dans la contemplation des choses les plus naturelles : un arbre,
une fleur, une maison de campagne baignée dans la verdure,
une attitude féminine mélancolique et dans la poésie
de la routine quotidienne.
(Illustrations : "Diligences à Louveciennes",
Pissaro, "Le printemps", Monet, "L'examen de danse",
Degas, "Deux jeunes filles au jardin", Renoir)
"L'impressionnisme voit et représente
la nature telle qu'elle est, c'est à dire uniquement en
vibrations colorées" (E. Manet).
La seconde des huit expositions du groupe se déroula en 1876. En 1883, la mort de Manet ébranle l'unité stylistique des impressionnistes, malgré l'adhésion de nouveaux artistes comme Gauguin, Seurat et Signac.
Lors de la dernière exposition en 1886, Cézanne
expose des toiles qui annoncent les promesses de l'art du 20è
siècle, c'est un véritable précurseur du
cubisme.
(Illustration : "Paysage avec viaduc",
Cézanne)
Ces peintres firent de la lumière l'objet essentiel de leur travail, écartant les couleurs sombres pour utiliser des tons purs et une touche divisée.
Ils ne cherchent plus à représenter les contours précis des personnages et des choses. Ils observent attentivement le reflet changeant du soleil et la décomposition de la lumière. L'abandon des sujets traditionnels et la juxtaposition de touches plus ou moins denses donnent à ces oeuvres
un aspect inachevé et superficiel qui choquera
les partisans de l'académisme.
(Illustrations : "Les cathédrales",
"Impression, soleil levant", Monet)
Chef de file de l'école impressionniste, fils de magistrat, Manet découvrit sa vocation de peintre après avoir achevé des études classiques.
Il parvint à entrer à l'école des Beaux-arts, où il eut Couture pour maître.
En 1859, il tenta d'exposer au "Salon". Le jury le refusa : il 'avait pas apprécié cette nouvelle façon d'étendre la couleur. Entre lui et Manet commence alors une très longue brouille.
Il abandonna quelques temps l'impressionnisme pour se consacrer à la Renaissance. Son regard s'arrêta particulièrement aux Vélasquez, Goya et Frans Nals.
Lors de l'exposition du groupe des jeunes impressionnistes en 1874, Manet s'abstint d'exposer ses toiles volontairement : il était persuadé qu'il fallait lutter de l'intérieur pour faire éclater les vieilles structures académiques.
Manet fut pris comme un symbole du renouveau par
Monet, Degas et Renoir. Il entra en pleine phase impressionniste
lors de son séjour à Argenteuil (1875) et renouvela
ses thèmes (courses hippiques, intérieurs de bistrots...).
(Illustrations : portrait et "Intérieurs de bistrots", Manet)